Ces fleurs que l’on arrache pas
Je l’ai dit! J’ai vraiment cru que l’écriture c’était fini pour moi. Que je n’y arriverais plus.
Et puis, un moment donné l’hiver dernier, alors que je me sentais particulièrement déprimée, sur le point d’exploser en raison de cet impératif besoin de créer qui n’arrivait plus à s’extérioriser, je me suis remise à peindre. Et, j’ai tout bonnement repris mes pinceaux auxquels je n’avais pas touché depuis au moins vingt bonnes (et moins bonnes!) années!
Et, je l’avoue, j’ai été un peu choquée de voir à quel point je savais encore. Et qu’à la limite, c’était presque comme si je n’avais jamais arrêté de peindre! Et cela même si pendant longtemps, je m’étais dit que pour moi la peinture, et bien c’était fini. Que ça avait été une activité que j’avais exercé avec l’innocence de la jeunesse. Vous savez! Celle qui ne se demande pas si elle a le talent pour. Et qui si elle se l’était avoué, aurait dit qu’elle se serait bien vu en Picasso…
L’oreille coupée en moins, ais-je besoin de le préciser?
Et, comme tout est dans tout, cette dizaine de toiles que j’ai peintes depuis, je les aie créées sur la thématique de mes Insoumises! Ces femmes de ma lignée matrilinéaire (comme on dit en généalogie, tel que je l’ai appris récemment).
Bref! Ce que je n’arrivais plus à mettre en mots, je me suis mise à le laisser gicler sur la toile comme s’il n’y avait pas de lendemain.
Et, la beauté de ces retrouvailles avec la peinture, comme avec un vieil ami qu’on pensait mort d’inanition, c’est que j’ai alors su avec certitude que ce serait pareil pour l’écriture.
Et, j’y pensais justement la semaine dernière. Que ce projet de livre dont le titre de travail est toujours «Le Sang des insoumises» (jusqu’à preuve du contraire), et bien j’avais presque oublié à quel point il était avancé.
Parce que l’automne passé, celui d’il y a un an déjà, parmi toutes ces actions que j’ai entreprises pour passer à travers la pandémie, je me suis pris une coach d’écriture. Et, en revoyant mes notes prises alors, je me suis rappelée que tout était déjà là. Qu’il me restait juste à écrire. Et, en repassant à travers mes notes de ces rencontres virtuelles (pandémie oblige!) que j’ai eu avec cette coach bienveillante, j’ai ressenti de nouveau cette émotion que j’avais eu lorsqu’on a comme mis le doigt sur la trame qui s’imposait. Cette évidence que la narratrice, et bien ce ne pouvait être personne d’autres que ma fille, mon ange parti trop tôt. Et, pensée un peu étrange je le conçois, qu’elle, ma fille, elle pourrait dire ce que moi je n’arrive pas à dire. Parce que sa motivation (un personnage doit forcément en avoir une n’est-ce pas?) ce serait justement cela. Vivre. À travers nous. Et que ces événements de prime abord si laids dans nos vies à toutes (ma mère, Jeanne, Lucienne, sa mère avant elle) se trouveraient illuminés sous le regard d’Annabelle.
Bref! J’y repense et je suis émue.
Et, je me dis que l’écriture c’est sans doute un peu comme la maternité. Ce bébé que l’on porte en soi, il a déjà tout pour exister. Il faut juste lui laisser le temps, comme une fleur, de venir au monde.
Sans qu’il ne soit nécessaire de tirer dessus.