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Mister Big ou la glorification des amours toxiques, India Desjardins

J’ai peu parlé livres depuis des mois mais c’est loin d’être faute d’avoir lu! Parce que si en 2020 j’étais assez fière d’avoir englouti près d’une trentaine de livres au cours de l’année, je me suis donné le défi en 2021 d’en lire encore davantage.

Et, comme on parle beaucoup de violence conjugale, et de ces trop nombreux et inexcusables féminicides qui ponctuent les bulletins d’infos avec une régularité choquante (en ce moment au Québec, nous en sommes rendus à dix depuis le début de 2021, un chiffre qu’on atteint généralement en une année entière!), j’avoue que mes lectures de ce début d’année ont comme été un peu teintées de cette réalité actuelle.

Ma dernière lecture en liste? Celle de l’autrice québécoise India Desjardins qui dans «Mister Big ou la glorification des amoures toxiques» fraichement sorti en librairie a pris le prétexte de la série culte «Sex in the city» pour se pencher sur l’influence de la fiction dans nos choix amoureux. Sujet qui pourrait sembler superficiel au premier regard mais qui s’avère extrêment riche en réflexion. Car je vous le dis! C’est une lecture vraiment très intéressante et qui figurera certainement dans mes coups de coeur de 2021 (ces choses-là, on les sent n’est-ce pas?)

Le questionnement de départ de l’autrice est celui-ci: La fiction peut-elle influencer notre perspective du monde? Et en particulier nos choix amoureux? Et pour répondre à cette question existentielle, India Desjardins part de «la» fiction culte entre toutes (série fétiche d’une horde de mes congénères et de moi-même, je le confesse!) pour tenter, en décortiquant la relation des personnages de Carie et Mister Big, de démontrer qu’en réalité, cette relation présentait tous les traits de la violence psychologique par excellence. La relation malsaine type, pour le dire autrement.

Et pour appuyer sa thèse, l’autrice trace un parrallèle avec de nombreux autres films et séries télé qui, individuellement, viennent confirmer la règle. Soit que pour la majorité d’entre elles, les fictions qu’on nous présentent ont pour caractéristique presque unique de nous présenter des personnages féminins toujours secondaires, fragilisés et qui pour atteindre le nirvana du succès, doivent forcément parvenir à obtenir la validation sous la forme de l’amour d’un homme. Et que, ce faisant, on se retrouve trop souvent avec des modèles qui de façon plus ou moins voulues par leurs auteurs, valorisent une certaine forme d’amours toxiques et inégalitaires.

Outre la réflexion qu’ India Desjardins porte sur une des séries phares des années 2000 et que j’ai personnellement le plus écouté dans ma vie, j’ai particulièrement aimé le fait qu’elle cherche des solutions à une problématique réelle. Soit que peu importe la forme d’art – que ce soit autant en peinture, en littérature qu’en fiction – les hommes sont toujours présentés comme le «modèle unique» de base de l’humain. Et en fiction, ça pourrait se résumer ainsi. Un homme distant mais dépositaire du succès, ambivalent au possible. Pensez Mister Big. Cet homme qui est toujours en limousine forcément conduite par un chauffeur. On ne dira jamais ce qu’il fait comme boulot mais on nous laisse imaginer qu’il gère rien de moins que le monde. Cela alors que les femmes elles, sont quasi systématiquement reléguées au second rang. Dans le genre, ce personnage imparfait qui pour évoluer doit nécessairement obtenir sa validation du regard des hommes. Et le seul chemin pour y parvenir, ça semble d’obtenir l’amour de l’un d’eux. Le mariage constituant le nirvana des meilleurs espoirs féminins.

Parmi les solutions que l’autrice entrevoit, celle notamment d’enseigner l’histoire des femmes. De présenter par exemple autrement les écrits des femmes, d’accorder une plus grande importance aux sujets que celles-ci choisissent d’exploiter en art et à leur façon de les exploiter.

Elle cite par exemple l’œuvre pourtant archi-connue partout dans le monde de la canadienne Lucy Maud Montgomery, «Anne la maison aux pignons verts» qui, bien que phénomène ne s’étant jamais démenti, a toujours été boudé par les universitaires. La vérité c’est qu’on enseigne ce qu’on considère comme étant le génie universel. Et que celui-ci semble devoir se conjuguer toujours au masculin. Comme si l’autre partie de l’humanité, féminine, ne valait rien qui vaille la peine d’être enseigné.

«C’est vrai qu’on a tendance à enseigner ce que l’on considère comme le génie universel. Il faut habituer les étudiants et étudiantes à réfléchir à la place des écrivaines dans le canon littéraire, en leur rappelant que si elles en font si peut partie, c’est que le canon a été défini pendant des siècles par les hommes». (Page 147, citation du professeur d’université Alain Farah)

Vraiment! Une lecture fort pertinente et actuelle, il faut en convenir!

Vous l’avez lu? Je suis curieuse de savoir ce que vous en avez pensé!

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Les MOOC vous connaissez? Ces cours offerts en ligne de façon massive et gratuite, et cela, sur les thématiques les plus diverses.

Un peu comme sous un certain effet de synchronicité, le livre de India Desjardins m’est justement tombé dans les mains alors que je terminais tout juste l’une de ces formations en ligne sur laquelle je suis tombée un peu par hasard en février dernier. Mais dont la thématique, en plus d’être définitivement dans l’air du temps, semblait m’être destinée.

Cette formation, un MOOC culturel proposé par le Grand Palais avec le soutien de la Fondation Orange et intitulé Peintres femmes à travers les âges, porte justement sur ces femmes artistes en peinture qui ont été d’une façon un peu inexplicable rayée de l’histoire de l’art. Un domaine ou comme dans bien d’autres, le féminin est encore aujourd’hui ultra-minoritaire. Une magnifique occasion je trouve de découvrir des artistes des siècles passés malheureusement méconnues telles Angelika Kauffmann, Constance Meyer, Suzanne Valadon et Mary Cassatt notamment. Mais aussi, des peintres femmes à qui les musées modernes semblent enfin faire un peu de place, telles Elisabeth Vigée Le Brun et Berthe Morisot. Ou encore, d’autres aux parcours plus tragiques, telle Artemisia Gentileschi. Toutes ayant en commun d’avoir du lutter pour simplement avoir le droit de peindre en leur temps.

La beauté de ce MOOC c’est qu’il a été pensé pour appuyer l’exposition «Peintres femmes, 1780-1830» initialement prévue ce printemps au Musée du Luxembourg. Pandémie oblige, les plans sont en suspens en ce qui concerne cette exposition pour l’heure. Mais n’empêche que ce MOOC m’a donné à moi l’impression de voyager! Et pour ajouter à l’illusion, je n’ai pas hésité une seconde à commander le fabuleux livre de l’exposition directement du Musée. Du grand bonheur! Le lien pour s’inscrire est tout juste ici.

Et si le principe des MOOC vous plait et que comme moi la thématique des femmes artistes vous inspire, je vous propose également cette autre option portant de son côté sur les femmes artistes plus contemporaines et qui ont œuvré de 1900 à nos jours. Intitulé «Elles font l’art», ce MOOC est ainsi offert sur la plateforme FUN, en collaboration avec le Centre Pompidou. Composé de cinq séquences qu’il est possible de parcourir à son rythme, ce MOOC sera accessible jusqu’au 25 juin. Ce cours permet de découvrir les parcours de femmes artistes des courants des avant-gardes des années 1910-1930, du tournant féministe des années 1960-1970, mais aussi, les artistes d’aujourd’hui.

Il est donc encore temps d’en profiter.

Alors? Vous avez expérimenté ces MOOC thématiques? Venez m’en parler! Je suis impatiente de savoir si vous les avez aimées autant que moi!

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