Accepter de laisser une trace, quelle qu’elle soit
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« Comme de toute façon je ne comprends pas grand-chose, autant regarder le monde comme un spectacle» (Philippe Delerm, Écrire est une enfance)
Je sais ! Cette citation de Philippe Delerm finissait ma dernière chronique ! Et pourtant, si j’ai envie de la reprendre aujourd’hui, c’est qu’elle me parle d’une façon que je peux difficilement expliquer !
Parce que moi aussi, longtemps j’ai perçu mon univers familial comme étant le reflet d’un monde auquel je ne comprenais absolument rien. Je n’en faisant pas partie, n’y avais pas ma place.
Comme une simple observatrice…
J’aurais tout aussi bien pu être cachée dans une fente du plancher que l’on n’aurais pas moins su que j’y étais…. Un peu comme au théâtre.
Vous savez ce que c’est ?
Avoir beau être assis au premier rang mais n’en être pas moins conscient que ce spectacle, vous n’en êtes pas…
Ou encore ? Comme un jeu dans lequel on vous aurait parachuté, mais dont vous n’auriez aucune idée des règles…
Et bien que j’aie toujours écris, je pense que le véritable déclencheur pour moi a été la perte de ma fille, il y aura bientôt quatre ans (j’allais dire trois ! Comme quoi, même ce temps là, il m’arrive d’en perdre le compte !) Puis la crise de la quarantaine. Et cette révélation avec la maladie de ma mère, comme un coup de poing en plein visage, que de cet espoir que j’avais toujours eu qu’un jour ce serait mon tour et que ma mère pourrait enfin être ma mère et moi sa fille…je devrais en faire le deuil.
De cela aussi…
Parce que cela aussi ça vient avec l’âge ! Découvrir que nos parents finissent par devenir comme nos enfants…. Cela dit sans aucune intention de critique à son égard bien sur ! Tout juste une constatation toute banale. Comme de réaliser en s’éveillant le matin que le ciel est gris. Ou qu’il pleut.
Je me souviendrai toujours de cette vision que j’avais eu alors. Moi. Telle une noyée qui tente de sortir de l’eau une première fois. Puis une deuxième. Et qui découvre dans un dernier sursaut que si elle n’y arrive pas cette fois, elle y restera. Ayant réalisé à quel point j’avais pu frôler le précipice, en apprenant que ma fille aurait été trisomique…
Pourquoi est-ce que j’écris alors ? Pourquoi est-ce que je balance maintenant depuis près de trois ans toute cette histoire familiale que j’avais pourtant tu toute ma vie jusque là ?
Pour surnager. Pour ne pas sombrer. Pour que le court passage de ma fille dans ma vie n’ait pas été vain…
Et pour que dans cet héritage familial que je transmettrai forcément – consciemment ou non – à mon fils, il parvienne à y trouver …un peu ma trace.
Et sa place à lui.