Bouts de textes et fonds de tiroirs
Histoire de titiller l’inspiration et de taquiner les idées, j’ai pris la résolution, en ce début d’année, de fouiller mes fonds de tiroirs, à la recherche de bouts de textes épars…
Un peu comme cela semble le cas pour les fonds des océans, là ou le moindre mouvement semble avoir ce pouvoir de faire remonter à la surface certains vestiges oubliés depuis longtemps, soudainement tirés des fonds brumeux et ombragés… Je me dis ainsi que de ressortir ces vieux textes ne devrait pas manquer de stimuler ma créativité!
Et je ne parle même pas ici de l’immense bénéfice de faire le ménage dans mes dizaines de carnets griffonnés dans le chaos le plus total, d’une multitude mots qui partent dans tous les sens…
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Parfois je me dis que, tous, nous passons sans doute la plus grande partie de nos vies à tenter de défaire ce que d’autres ont fait avant nous…
Alors que mon arrière-grand-père du côté maternel est arrivé en Abitibi pendant la première guerre mondiale, obligé de défricher pour s’installer. Puis de défricher encore pour avoir le droit de conserver sa terre, mon grand-père – et fils du premier – a quant à lui passé sa vie à reboiser.
Pour cacher au monde tout ce que furent nos vies ? Ou bien pour avoir ce sentiment de réparer je ne sais quelle faute?
Puis mon grand-père est décédé. Et avec sa mort m’est apparue cette certitude qu’eux tous, mon arrière-grand-père, mon grand-père et même elle, des années plus tard, ma fille, petite comète fragile et désarticulée, envolée avant même d’avoir eu ses ailes, tous avaient eu leur projet…
Avaient-ils su, eux tous, au moment de la vivre de quoi aurait l’air leur vie, une fois celle-ci terminée?
Peut-être que non.
Mais dès lors, je me suis raccrochée à cette idée de projet comme à une bouée de sauvetage. Moi aussi j’allais consacrer ma vie à quelque chose de plus grand que moi. Peignant avec des mots comme un peintre fou, heureux de voir ses couleurs jaillir en un flot ininterrompu et un peu chaotique cette toile familiale déjà mille fois peinte.
Moi-même déterminée à me ré-approprier ce pouvoir de décider du point final.
Mon grand-père est décédé désormais et depuis, sa maison laissée à l’abandon après avoir été vandalisée par quelques pillards s’étant peut-être imaginé y découvrir un quelconque trésor…
Quant à moi, je préfère conserver l’image de cette maison de mon enfance, empoignée par les arbres et ravalée par la forêt. Désintégrée par la force et la puissance du temps.
Comme si tout cela n’avait jamais existé.
Mais libre désormais de tout réinventer…