
Clin d’oeil à un ami, entre deux portes
Je n’imagine pas révolutionner le monde en l’affirmant mais il m’arrive de me dire que les médias sociaux, ça génère parfois des situations flirtant par moments avec le surréel.
Hier, en allant sur facebook, j’ai reçu une alerte m’informant de l’anniversaire d’un ami. Du grand banal, ici, rien pour écrire à sa mère direz-vous!
Aussi, probablement tout aussi banalement, suis-je allée lui écrire un mot pour lui souhaiter un bon anniversaire sur sa page…avant de me rendre compte, quelques secondes plus tard, qu’il était décédé l’automne dernier.
Guy (c’était son nom) comptait parmi mes plus vieux amis depuis que je suis arrivée à Montréal pour les études, à la fin des années quatre-vingts. Lui, je l’ai rencontré quelques années plus tard, sur ce qu’on appelait à l’époque les boîtes vocales… Vous vous souvenez? Un système téléphonique permettant de faire des rencontres, parce que voyez-vous, à l’époque j’étais célibataire. Mais, la beauté de ce système qui peut sembler aujourd’hui pas mal vintage, c’est qu’il arrivait aussi qu’on y fasse de vraies rencontres d’amitié.
Car voilà, avec lui, ça a toute suite été ça. Une vraie belle amitié, sans la moindre ambiguïté. Un peu comme un frère, du genre qu’on a l’impression d’avoir toujours connu. À l’époque, j’ai tenté de lui présenter des amies. Lui a fait la même chose pour moi. On s’est croisés dans des soirées. Il est même venu avec sa gang aux activités de célibataires que moi-même j’organisais. Et surtout, c’est pas mal grâce à lui si aujourd’hui je travaille en télé. Car en effet, lorsque je l’ai connu, il était déjà au sein de la chaîne, au service du sous-titrage de sorte que j’ai à l’époque pris quelques cours de sténotypie et envisagé pendant un temps, de travailler dans ce domaine. Cela avant de finalement me diriger vers d’autres étages et d’autres secteurs de notre belle grande tour par quelques détours de circonstances.
Et puis voilà! J’ai rencontré l’homme de la maison (la mienne!), puis je suis déménagée en banlieue. Et, comme ça arrive bien banalement à tout le monde, la vie a simplement fait en sorte que, trop occupés ailleurs l’un comme l’autre, nos chemins se sont croisés de moins en moins souvent. Puis plus du tout certaines années, à part en se croisant au détour d’un corridor de façon plus ou moins aléatoire..
Et puis voilà que l’été dernier, alors que je me trouvais en vacances à Barcelone avec ma famille, il m’a écrit sur facebook. Et comme si on s’était quittés la veille, on s’est mis à discuter. J’ai alors appris que très malade, il était en arrêt de travail. Et qu’il avait quitté Montréal pour retourner auprès des siens, à Roberval dans sa région d’origine…
À travers tout cela, savez-vous ce qui est le plus fou? Je le réalise aujourd’hui. C’est que l’imminence de sa fin, je pense que je n’ai pas voulu y croire, pas plus que la voir…
Puis, en août dernier, sur facebook toujours, pour souligner notre quinzième anniversaire de mariage à l’homme de la maison et moi, Guy nous avait offert la chanson «Jenny» de Richard Desjardins qu’il avait qualifiée de plus belle chanson d’amour québécoise de tous les temps. Cela, un peu comme un clin d’œil qu’il ignorait me faire, sans savoir que Jenny, c’est justement le prénom que j’ai failli avoir à ma naissance…
Alors hier, en apprenant comme ça, d’une façon un peu brutale sur facebook qu’il était parti bien tranquillement après avoir demandé l’aide médicale à mourir, je m’en suis voulue… De ne pas y avoir cru d’abord. D’avoir fait comme s’il allait toujours être là. Mais surtout, d’avoir laissé la vie et le quotidien me laisser croire que notre amitié avait été plus anecdotique que significative. Et d’avoir laissé nos contacts s’espacer et s’étioler.
Malheureusement, la vie c’est un peu comme un sens unique sur lequel on ne peut jamais espérer faire marche arrière, n’est-ce pas ? Mais sois assuré d’une chose, Guy! Je continue de croire que je te croiserai de nouveau, un de ces quatre matins, entre deux portes. Et que ce sera comme si nous nous étions vus pas plus tard qu’hier.
Parce que la vérité, c’est que les grandes amitiés, ça ne meurt jamais!
Pour toi Guy ce matin, voici ma chanson. Celle qu’à mon tour j’ai envie de t’offrir.
Bye mon ami!

