Dans cent ans, que restera-t’il de nous? – La mémoire de l’intime
Hier, je suis allée faire un tour à Québec, une ville où j’adore faire un saut de temps en temps. Mais cette fois-ci, il n’était pas question de tourisme!
Oh que non!
Mais plutôt d’un voyage dans le temps…
En fait, ces quelques 256 km, je les ai parcourus comme sur une route au bout de laquelle j’allais cueillir un trésor. Littéralement!
C’est qu’il y a quelques années, par quelques étranges retournements dont la vie a parfois le secret, j’ai pu entrer en contact avec une cousine de ma grand-mère du côté de la famille maternelle que je n’avais jamais connue jusque-là.
Notre lien ?
Sa mère, tout juste décédée, était la dernière sœur encore vivante (jusqu’à ce que ma mère tombe sur son nom dans la rubrique nécrologique (on s’amuse comme on peut n’est-ce pas?) de Lucienne, cette arrière-grand-mère un peu rebelle dont j’ai parlé souvent sur ce blogue. Une aïeule dont le souvenir familial semblait auréolé, non pas de grandeur, mais plutôt d’une odeur de soufre. Parce qu’en son temps, quelque part au courant de l’année 1929, elle a tout bonnement décidé d’abandonner mari et enfants alors qu’ils vivaient dans le quartier Limoilou (Québec). Pour, selon la légende familiale, venir vivre des «fruits de la prostitution» dans ce qu’on appelait alors le Red Light montréalais…
Et, pour faire court parce que j’ai raconté son histoire de long en large sur ce blogue (il suffit de chercher les billets sous la catégorie «Lucienne»), mon arrière-grand-mère «sulfureuse» a vécu ici, à Montréal jusqu’en octobre 1953, moment de son décès, probablement d’un cancer. On pense alors qu’elle aurait été laissée à la morgue pendant quelques deux mois avant que son frère ne vienne de Québec pour procéder aux démarches d’inhumation…dans une fosse commune où elle repose toujours, presque soixante-dix ans plus tard. Ceci enfin, dans un cimetière qui, par le plus grand des hasards, se trouve à moins d’un km de chez moi.
Parce que vous l’aurez compris – ou si vous me lisez depuis longtemps, vous vous en souviendrez – sur l’histoire de cette arrière-grand-mère rebelle, je me suis bien sur beaucoup penchée depuis presque dix ans maintenant! Parce que clairement, Lucienne était le sujet le plus tabou qui soit dans notre univers familial. Rien de moins que le symbole de la sorcière par excellence. Du genre, j’oserais dire, dont on évite surtout de prononcer le nom…
Alors vous comprendrez j’en suis certaine que lorsque cette cousine éloignée (de façon géographique tout autant que généalogique) m’a écrit la semaine dernière pour me dire qu’une autre cousine avait retrouvé dans ses trésors familiaux ce qui avait été la montre de Lucienne, j’ai arrêté de respirer. Et que, lorsqu’elle m’a demandé si j’aimerais l’avoir, ma réponse a jailli en moins d’une nano seconde…
Oui!!!! J’arrive! Non ! Je m’envole plutôt pour la chercher!
***
Je suis tombée cette semaine sur un reportage super intéressant de France Inter sur internet. On y posait cette question de savoir comment décider de garder ceci ou de jeter cela. Et de savoir où devait commencer le travail d’archives familiales.
Par exemple, les photos de familles du siècle dernier. Ou encore, comme cette montre, trésor inespéré de mon arrière-grand-mère qui s’est rendu jusqu’à moi de façon presque miraculeuse. Et qui, avouons-le, aurait pu disparaître mille fois depuis soixante-dix ans! Cela à une époque, la nôtre, où les objets, en se démultipliant et en devenant de plus en plus accessibles, semblent en même temps, et de façon un peu triste, perdre leur valeur.
Une montre d’une valeur monétaire assurément négligeable bien sur!
Mais O combien inestimable à mon cœur!
Du coup, je ne peux m’empêcher de me demander ce qu’il restera de nous dans cent ans. À une époque justement où on ne conserve plus rien malheureusement.
Et vous? Vous en avez de tels trésors familiaux qui « dorment » chez vous ?
Si c’est le cas, il faut vraiment en prendre grand soin!