La vie au temps du Coronavirus,  réflexion

Du coq à l’âne ou lorsqu’on se met à trop penser

Une des grandes vérités de ces temps de pandémie c’est probablement qu’on a le temps de penser. Parce que du temps, on ne semble n’avoir que ça, n’est-ce pas?

Et de fait, je ne peux m’empêcher de voir tout ce que ma génération a eu en abondance, la liberté, les opportunités, l’ouverture. Et tout ce que la jeune génération d’aujourd’hui, tant les adolescents que les jeunes adultes, n’ont même pas encore eu le temps d’apprécier. Au lieu d’un champ de possibles, c’est une vague de limites qui leurs sont désormais imposées en raison d’une pandémie mondiale.

Et je me dis que c’est l’évidence que cette pandémie là, ça va marquer leur vie. Dette écrasante, modes de vie charcutés, socialisation sous le mode du virtuel, planète sous le joug du recul de la pollution par le plastique. Ce n’est pas très réjouissant – convenons-en! – comme champ de vision vers l’avenir.

Avec mon amie Karla, on en discutait justement récemment. Elle aussi en télétravail depuis mars, elle se retrouve en cet automne pandémique à partager la maison le jour avec son plus vieux qui vient d’entrer au collège. Alors que pour nous, l’entrée au Cégep à la fin des années quatre-vingts a symbolisé l’entrée dans la vie adulte (premier appartement, premiers co-locataires, premières amours, etc), pour le fils de mon amie, cette entrée dans la vie d’adulte se fait plutôt, un peu tristement, en hermite… Presque en cachette pourrions-nous dire. Et, d’une façon un peu compréhensible, mon amie me disait justement combien elle s’inquiétait pour son grand, obligé de suivre ses cours à distance, parfois même avec des cours pré enregistrés, sans cette vie sociale et ces interactions entre pairs si importante au début de l’âge adulte.

Une génération un peu comme tombée dans un trou noir de toute cette histoire de covid, nous disions-nous elle et moi.

On a beau dire que chaque génération doit faire face à ses défis. Moi-même, je réalise combien notre génération – nous les fameux X – en aura vu. Le Sida, le chômage des années 80, le No future qui était le nôtre, Tchernobyl….

Chaque génération ses défis, c’est le moins qu’on puisse dire.

Mais c’est quand même fou de réaliser combien le panorama a pu changer depuis 50 ans. Je l’avoue, je comprends mieux mon grand-père maintenant qui avait l’air perdu en renonçant à son téléphone à roulettes après s’y est accroché jusqu’à la fin des années 90. Lui a vu les calèches! Alors que nous on se démène à tenter de comprendre nos téléphones prétendument intelligents.

On imagine en effet que c’est seulement dans les films que les gens ne se parlent plus et que la sexualité et les relations humaines sont abstraites et désincarnées. Mais avec la pandémie, c’est comme si ça nous mettait déjà de force les pieds là-dedans…

La fin des relations humaines. C’est comme si nous étions déjà dans la fiction. Pareil comme la servante écarlate, fiction qui semble en train de devenir réalité aux États-Unis avec la nomination de cette Juge croyante et anti avortement qui est en train d’entrer à la cour suprême! Du coup, je commence à avoir conviction que de mon vivant, je verrai la re-criminalisation de l’avortement. Moi qui me souviens pourtant avec émotion du début de ma vingtaine. J’avais alors suivi avec intérêt la fameuse cause ici au Québec de Chantal Daigle. Cette jeune femme qui s’était battue jusque devant la Cour Suprême pour défendre son droit de se faire avorter. Et qui au dernier moment, avait fait un royal pied de nez aux juristes en allant se faire avorter aux États-Unis en cachette…

À l’époque, j’y avais vu le signe que la société avançait.

Trente ans plus tard, je réalise que rien n’avance jamais vraiment. Que beaucoup de choses ne font que tourner en rond. Et comme au Monopoly, c’est bien souvent «Retournez au début, ne passez pas Go».

Ou pire. Comme dans un monde virtuel un peu bizarre, à la façon des dystopies pourrions-nous dire, et dans lequel il n’y a ni début, ni fin, ni avancée.

***

Je relis ce billet, sans début, sans fin me semble-t’il. Et je me dis que c’est sans doute là le reflet de l’atmosphère ambiante.

Trop de questions pour ma capacité à trouver des réponses.

Alors de là à conclure!

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