La 25ième heure ou la recherche du temps perdu
Vous connaissez, vous aussi je parie !
Ce sentiment, presque étouffant par moment, que vingt-quatre heures ne suffisent pas dans nos journées de fous!
Je l’avoue, à une fréquence presque aussi régulière que le tic-tac incessant des aiguilles de ma montre, je me retrouve confrontée à cette éternelle question de savoir quand il arrivera ce moment ou ce sera enfin mon heure à moi….
Ce moment ou une fois les besoins de tout le monde assouvis, je pourrai enfin me consacrer aux miens.
Mais voilà, c’est bien là sans aucun doute une cruelle vérité que, tous, nous ne disposons que de 24 heures dans une journée, n’est-ce pas?
Desquelles nous sommes forcés d’en soustraire entre six et neuf (selon les besoins!) pour dormir.
Puis au moins huit pour le travail. Selon le poste qu’on occupe! Et qu’on soit salariés, entrepreneur ou patron…
Et environ une heure encore pour le transport. Puis encore une autre pour l’organisation des repas, les courses, la préparation des lunchs (si on a des enfants par exemple!)
Ces mêmes enfants qui une fois scolarisés, nous demanderont eux-aussi quelques heures par semaines pour la supervision des devoirs… Notamment!
Cela, sans parler bien sur de tout ce temps passé, occupée (ou perdue!) dans une quelconque file d’attente… Ou à me rendre aux objets perdus de l’école pour tenter de récupérer une tuque, un foulard ou cette mitaine égarée qui se meurt de retrouver sa jumelle… Ces accessoires indispensables à la survie dans un pays froid comme le mien…
Et que mon fils égare, lui aussi, à la fréquence du tic-tac de ma montre…
On ne s’en sort pas, je crois! Irrévocablement, le temps est limité. Il nous file entre les doigts. Et nous, on demeure éternellement sur le quai à l’attendre cette fameuse hypothétique heure qui ne sera consacrée qu’à soi !
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Depuis l’été dernier, presque en secret, j’avais cru avoir déjoué le quotidien et me l’être inventée cette fameuse vingt-cinquième heure susceptible de révolutionner notre ère moderne.
Et ma vie!
Bien sûr, je n’en parlais pas trop fort ! Qui sait si je ne me serait pas fait voler le brevet, me disais-je chaque jour !
Aussi, profitant du soleil matinal estival, j’avais commencé à me lever très tôt, osant même parfois défier le plus connu des astres. Un peu comme dans un défi quotidien pour savoir lequel de nous deux serait le premier levé…
Au fil des semaines, des mois, je suis littéralement devenue accro à cette heure ou deux au cours desquelles je pouvais croire, l’espace d’un instant, que j’étais seule dans la maison et la ville, tous deux encore endormis. Tout comme mes voisins trop bruyants d’ailleurs que le temps d’une parenthèse, je pouvais imaginer avoir disparu de l’univers…
Ce moment hors du temps passé à savourer un, puis deux lattés. Lisant mes journaux d’une page à l’autre. Puis à flâner sur Twitter et sur les journaux européens, pour la plupart accessibles à portée de clic sur ma tablette…
Sauf que voilà, l’automne est arrivé. Puis l’hiver. Au fil des semaines, le soleil n’a plus été cet adversaire redoutable auquel l’été m’avait habituée. Et peu à peu, celui-ci m’a littéralement laissé le champ libre…
Seule vivante dans l’immensité de la galaxie assoupie.
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Voilà qu’il y a une semaine, j’ai brutalement été ramenée à la réalité de cette évidence: on ne joue pas impunément à l’apprenti sorcier avec le temps…
C’est ainsi qu’il y a une semaine ou deux, je ne sais plus, j’ai reçu un appel de ma mère en soirée, étonnée que déjà vers 19h, je sois presque au lit. Mais n’en faisant pas plus de cas sur le moment…
Même scénario le lendemain. Puis les jours suivants alors que ma mère s’est mise, d’abord timidement à me demander si ça n’embêtait pas trop l’Homme de la maison que je me couche si tôt.
– Moi: «Non ! Il en profite pour aller courir ! Tu le sais maman, il a commencé à se préparer pour le marathon ! »
Puis avec acharnement, suggérant que je devrais consulter un médecin. Prendre des vitamines.
– Moi: «Voyons maman ! Je n’ai aucunement besoin de voir un médecin ou de prendre de vitamines ! Tu le sais bien que je me lève à 4h du matin ! C’est janvier ! Dehors il fait noir beaucoup plus tôt. J’ai juste besoin de dormir ! »
Pour finalement ne plus chercher de détours pour me dire qu’elle s’inquiétait que je sois en train de faire une dépression !
– Moi (me sentant soudainement comme une enfant de quatre ans dont on remet en doute les réponses): «Voyons! Peux-tu bien me dire ce qu’il y a de si anormal de dormir huit heures par nuit (parce que bien sur, j’ai calculé ! Dormir de 20h à 4h du matin, ce n’est jamais rien de plus que huit heures de sommeil!!)? Qu’y a-t-il de si menaçant, ais-je rajouté, à ce que je ne sois pas disponible pour répondre aux besoins de l’univers après 19 ou 20h? »
Bref, je pense que ma mère a fini par comprendre!
Sauf que depuis, j’ai été frappée de deux ou trois vérités inaliénables… Notamment que d’espérer créer une vingt-cinquième heure, cela relève purement et simplement de l’utopie.
Que le temps n’est pas extensible à l’infini. Mais surtout, que comme dans le plus connu des principes scientifiques, rien ne se crée, rien ne se perd…
Les choses ne faisant selon toutes vraisemblances que se transformer.
Ainsi, on aura beau se créer un espace-temps qui ne soit qu’à soi. Forcément, il faudra retrancher l’équivalent ailleurs.
En ce qui me concerne, j’ai fait ce pari en 2015 de croire en cette folie de me faire moi-même monter un peu plus haut dans la liste de mes priorités.
Même si pour cela, je dois sauter du lit à 4h du matin…
Et disparaître de l’univers entre 19 et 20h !