Ce matin, je relisais un vieux billet, écrit il y a près d’un an, et dans lequel je racontais cette impression que j’avais parfois que nous étions, nous humains, peut-être sur terre afin de répondre à une question bien précise…
Dans le genre «colle insoluble» que nous nous transmettrions de génération en génération, jusqu’à ce qu’on trouve enfin la réponse. Ou à tout le moins, «une» réponse…
Si vous avez un blogue vous aussi, vous savez ce que c’est j’imagine ! On regarde nos statistiques de fréquentation, on réalise qu’un vieux billet est sorti du lot et que quelqu’un l’a lu et soudain, on se dit «Mais qu’est-ce que je racontais ce jour là ?»
Et puis une évidence nous saute aux yeux ! Que ces préoccupations que nous avions, un an plus tôt, nous les avons…toujours ! Preuve peut-être que la question, ce jour là, méritait vraiment réflexion !
Et fait étrange, en me rendant au travail hier matin, perdue dans mes pensées alors que je mijotais sur mon livre, je réfléchissais justement à cette fameuse «question»… Celle de savoir ce qui pouvait bien nous lier mes grands-parents, mon père et moi.
Cette question à laquelle visiblement, aucune réponse n’a encore été trouvée…
Et puis ? Alors que j’étais plongée dans un livre de psychogénéalogie (celui d’Elisabeth Horowitz), un lien qui pourra peut-être sembler un peu tiré par les cheveux, m’est venu à l’esprit. Car dans un passage, l’auteure soulignait l’importance des noms de famille (de même que des prénoms) dans la destinée d’une même lignée. Et alors que j’avais personnellement toujours trouvé cette partie de la psychogénéalogie comme étant quelque peu ésotérique, un lien m’est apparu en relation avec le nom de ma grand-mère du côté paternel…
Dans les fait, la mère de mon père qui était, je le rappelle d’origine algonquine, s’appelait Florence Lacroix. Et en cherchant une quelconque signification à son nom, la pensée m’a soudain traversé l’esprit que question «croix », ma grand-mère avait probablement été plutôt bien servie ! Alors que comme je l’ai compris récemment, le «calvaire» de sa vie avait fort probablement été ce deuil jamais fait de son fils, le frère aîné de mon père, Réo mort tragiquement à 14 ans, dans une scie à bois, en décembre 1939…
Une «croix » qui allait, j’en ai la conviction aujourd’hui, peser lourdement sur le destin de mon père qui est né…presque exactement un an jour pour jour après cette mort tragique, le 14 décembre 1940. Comment pourrait-on en effet nier le poids de cet événement, alors que vraisemblablement, mon père a été conçu à peine trois mois après le drame ? Au moment même ou, comme je l’ai appris il n’y a pas si longtemps, mon grand-père écrasé par cette tragédie de s’être retrouvé avec le cœur de son fils dans les mains (au propre comme au figuré !), a du passer des semaines à l’hôpital, se promenant nu dans sa chambre, devenu comme fou…
Est-il possible que mon père ait su d’office, dès sa naissance (ou même avant !) qu’il n’aurait jamais d’autre rôle que celui de remplacer un frère mort et par conséquent, insurpassable ? Recevant pour tout héritage cette «croix » qui allait peser sur lui de tout son poids. Jusqu’à l’anéantir…
Et c’est alors qu’en cherchant du sens à tout cela, une quelconque trajectoire pouvant faire lien, m’a traversé l’esprit cette unique question, capable de donner du sens… Mais me donnant le frisson au passage…. Et si mon rôle à moi était – avec mes écrits, mais aussi en faisant mettre, comme je le projette, une pierre tombale sur la tombe de mon père (qui je le rappelle, est dans une fosse commune depuis trente-trois ans!) – si mon rôle à moi donc, était justement de remettre cette «croix »à sa place ? Là ou elle doit être. Sur la tombe de mon père.
Et en essayant de voir comment je pourrais rendre cela dans mon livre, j’ai eu cette idée plutôt symbolique il va sans dire, d’imaginer que sur cette tombe, les arbres pourraient sans doute de nouveau grandir….
Jusqu’à ce que je réalise que par un curieux hasard, j’avais justement donné le nom d’un arbre à mon fils…
Olivier
Est-ce moi qui hallucine ou bien est-ce là comme un immense puzzle… dans lequel chaque morceau trouverait enfin sa place ?
« L’arbre que tu plantes dans ton jardin. Pour toi ce ne va être qu’une galère de tuteurs. Mais un jour, pour d’autres, l’acacia s’élèvera dans le ciel, où tu seras déjà, et il fera de l’ombre à ceux de ton sang, et toi tu n’en feras plus à personne. Tu ne seras que lumière pour ceux qui se souviennent. Une soirée d’été, quelqu’un de ta descendance sera là sous cet arbre, à humer la douceur. Ce petit-fils, cet arrière-petit-cousin, cette arrière-petite-nièce, qui que ce soit, il ne pensera plus à ses déceptions. Au contraire, il se sentira accueilli dans une plénitude, sous l’arbre muet la nuit. Alors il se dira : « D’où me vient tout cet amour ? » (Grandir, Sophie Fontanel)
2 commentaires
Anonymous
Bonjour Marie,
La voilà ! ta réponse. Tu viens de la trouver ! Moi, je crois, tellement, que nous sommes sur terre pour continuer une lignée commencée il y a longtemps.
Je crois que les Juifs ont trouvé la réponse à cette question que nous nous posons tous. Si je me souviens – du temps de mes années pensionnaires où nous lisions la Bible – ne commence t-elle pas en disant qu'un Tel, fis de qui est fils de… ainsi de suite ?
Nos lignées ancestrales sont ce que nous sommes de plus vraies ; rien de faux, ni d'inventé dans cette lignée. Bien sûr, nous pouvons embellir la vérité et même imaginer que certains de nos ancêtres ont été des héros et pourquoi ne serait-pas vrai, mais le sang qui coule dans nos veines à tous depuis des siècles est plus que réel.
Je crois, également, que nous sommes sur terre pour apporter à d'autres un peu de nous alors que les autres font de même envers nous.
L'important – du moins en ce qui me concerne – est de ne pas briser la lignée héréditaire de nos ancêtres.
Que tu veuilles placer une croix sur la pierre tombale que tu feras installer pour ton père est une des réponses à ces questions que tu te posais.
L'histoire de l'arbre est pertinente ainsi que les prénoms se rapportant aux arbres : la preuve le beau prénom de ton fils.
Mon grand-père paternel a planté un arbre à chaque naissance de ses enfants. Il en a eu 12 – et sur la terre de mon grand-père (un de mes cousins y demeure toujours) – il y a 12 arbres portant chacun le prénom et de mon père, de ses frères et soeurs. Lorsque ma grand-mère est décédée, il a planté un arbre pour qu'elle soit parmi ses enfants, éternellement. Il y a maintenant plusieurs années que mon grand-père est parmi eux. L'un de mes oncles a planté un chêne qui est devenu majestueux.
Il est certain que sur la tombe de ton père, les arbres grandiront à nouveau.
Bonne fin de semaine,
Marjo
MARIE
Il est fascinant je trouve de découvrir qu'alors que nous vivons dans une société qui peut par moments avoir l'air déconnectée de l'humain, nous demeurons liés les uns aux autres, malgré tout. N'y a-t-il pas une certaine beauté dans tout cela ?
Et puis, j'aime beaucoup cette idée de ton grand-père de planter un arbre à chaque naissance! Comme témoin du passage de l'humain, bien longtemps après qu'il n'y soit plus…
De m'intégrer dans une continuité familiale, ça m'a apporté énormément en ce qui me concerne. J'espère bien transmettre cela à mon fils ! Chose certaine, tout cela donne beaucoup de « jus » à mon livre !!
Une belle journée à toi Marjo !
Marie