réflexion

La vie, la mort et entre les deux, quelques points de suspension

Crédit: Pexels

De tous temps, l’humain je pense a un peu fantasmé sur cette idée, espèce de version moderne de la quête du Saint-Graal, de vivre pour toujours. Ou à tout le moins, de ralentir le processus du vieillissement dans une société ou, pour une grande majorité d’entre nous, nous écrase cette peur presque maladive de vieillir.

Et ultimement, de mourir.

Ce matin, je suis tombée  dans les journaux sur un dossier spécial traitant de la quête perpétuelle moderne de la jeunesse éternelle dans lequel j’ai appris l’existence de ce projet un peu secret mais assurément archi-coûteux de Google – baptisé Calico.

Un projet qui vise rien de moins que de tuer la mort…

Pour ma part, je me questionne un peu. Parce que personnellement, je ne veux pas vivre longtemps. Et par longtemps, qu’on se rassure, j’entends cent ans et plus!

Je me dis que je veux vivre, tout court.

Et pour dire à quel point le sujet de la lutte contre le temps est présent partout dans les médias, je suis tombée cette semaine sur cet autre article dans lequel on racontait que pour vivre plus longtemps, il fallait, selon une étude britannique, arrêter de faire l’amour. Parce que faire l’amour voyez-vous, ça demande de l’énergie ! (ce n’est pas moi qui le dis !)

Bien sur, on peut répondre à cela que comme bien des études qui prétendent nous convaincre d’un peu n’importe quoi et son contraire, on se retrouve ici devant un peu n’importe quoi ! Qu’il faut clairement en prendre. Mais surtout, en laisser !

N’en demeure pas moins que la crainte de vieillir est carrément devenue une préoccupation qui à mon sens, semble un peu malsaine à certains égards.

Pour ma part, je ne veux pas me ménager. Je souhaite au contraire mourir usée. Avec le sentiment d’avoir beaucoup aimé et pleinement vécu. D’avoir, qui sait, laissé peut-être même derrière moi ce que je ne suis même pas en mesure d’imaginer pour l’heure. Du sens ou des réponses pour ceux qui viendront après moi.

Comme ce grand trou noir dans lequel mon père a imaginé être tombé un jour. Et qu’aujourd’hui, plus de trente-cinq ans après sa mort, je m’acharne à tenter de transformer en quelque chose d’autre. Un peu comme une artiste qui sait voir au-delà du banal ou du laid.  Et faire de ce père que j’ai finalement si peu connu, en tricotant les mots, une espèce d’homme de papier. Un personnage de roman un peu plus lumineux et moins sombre que ce que lui avait imaginé être.

Vieillir au fond, ça m’importe peu.

Parce que la vie, la mort, je me dis parfois que c’est un peu comme les romans. Qui imaginerait lire un roman qui ne se terminerait jamais ? Une histoire sans fin, sans conclusion, sans morale finale? Des péripéties qui ne servent à rien parce qu’elles ne mènent nulle part?

Parce que la vie, la mort c’est un peu comme des points de suspension n’est-ce pas? Un grand flash entre deux néants. Un bref clignement des yeux nous laissant percevoir la lumière une fraction de seconde.

Puis plus rien.

Et pourtant, certains jours, je me prends à me regarder dans le miroir et soudainement, à déposer mes doigts le long de mes yeux pour en remonter la chair. Juste pour voir. Parce qu’à ce moment précis, je réalise que mon visage a changé. Que visiblement, je n’ai plus vingts ans. Que certaines rides ont commencé à creuser des sillons, ces marques qui un jour, deviendront à leur tour des tranchées …

Des rides qui déjà, ont commencé inéluctablement à tracer leur petit bonhomme de chemin. Sans même penser à me demander mon avis.

Mais qu’importe n’est-ce pas ?

Est-ce que je veux vivre jusqu’à 150 ou  même 200 ans ?

Jamais en cent ans !

Aussi, si mes rides sont le prix à payer pour avoir eu le privilège d’avoir vécu, aimé, exploré une fraction de seconde dans l’infini de mon espèce, je me dis que ces marques laissées sur ma peau sont probablement le plus beau trophée que je puisse souhaiter.

La jeunesse éternelle alors ?

À d’autres que moi ! J’ai trop à faire avant de mourir!

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