Pages féminines d’un autre temps…Conseils destinés aux fumeuses
CONSEILS À MADEMOISELLE
Fumeuses!
Venue de l’étranger, cette coutume est peu à peu entrée dans nos mœurs et la femme qui fume n’est point, à l’heure actuelle, une exception.
Pourtant, prenez-y garde, Mademoiselle, la fumée altère la fraîcheur, l’haleine et peut, à la longue, noircir les dents.
De plus, il n’est pas toujours admis (cela dépend du milieu et des circonstances) de fumer à tout propos et hors de propos.
Fumer une cigarette de temps à autre, dans l’intimité, à l’heure du café, dans une réunion de jeunesse, passe encore. Mais ne pouvoir se passer de la cigarette, partout et à toute heure du jour, cela devient une réelle infirmité, une intoxication positive, dont il faut se méfier.
Nous connaissons des femmes, chefs de maison qui «grillent» des cigarettes à la file, et ne peuvent vous recevoir sans immédiatement vous offrir et allumer une cigarette. Cette outrance nous paraît anti-féministe et anti-hygiénique, et la jeunesse doit la fuir avec énergie.
Nous ne voyons pas, d’ailleurs, une jeune dactylo ou une secrétaire, sacrifiant sans cesse à ce vice; les chefs s’y opposeraient fréquemment.
Outre que la dépense serait excessive, on nuirait à sa santé et à la fraîcheur de son teint.
Fumer, chez les «snobinettes» est surtout prétexte à exhiber ces ravissants nécessaires, qui sont parfois d’une rare préciosité; mais d’un autre côté, lorsqu’on sait y apporter une juste mesure, c’est une distraction, c’est aussi faire «comme tout le monde» sans affectation.
Autant une jeune fille qui fume sans arrêt nous paraît ridicule par son outrance même, autant une jeune personne qui refuse une cigarette d’un air pincé, dans un milieu où toutes les femmes fument, fait montre d’une intransigeance déplacée.
Là, comme en toutes circonstances, il faut savoir garder le juste milieu et s’adapter avec bonne humeur aux goûts et coutumes de la majorité.
(Le Petit Journal, 9 juin 1929)