Pages féminines d’un autre temps….De l’Art de la table
Si comme moi vous craquez littéralement devant n’importe quel vieux livre à vous tomber sous la main, vous tomberez très certainement sous le charme de celui-ci.
Un vieux livre de cuisine tout «encorsetté», à la mode de 1888…
Cette époque sentant le papier jauni dans laquelle rien, même le plus infime détail du quotidien, n’était laissé au hasard…
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LA NOUVELLE CUISINE BOURGEOISE
Service de table
La salle manger, la table. La salle à manger, le jour d’un dîner, doit être mise en ordre de bonne heure, et bien appropriée. En hiver, elle doit être chauffée longtemps avant l’heure du repas, mais la chaleur ne doit pas dépasser 15 degrés. Le soir, les fenêtres doivent être closes et les lampes ou les lustres allumés. Le sol doit être couvert d’un tapis, tout au moins à la place où s’asseyent les convives.
En été, ces précautions sont inutiles, on dîne autant que possible dans un lieu frais.
Le jour du dîner, la table doit être couverte d’avance. La nappe qui la couvre doit être très large et d’une irréprochable blancheur; elle est
couverte, sur la partie centrale par un ou plusieurs napperons. Le couvert des convives doit être symétriquement disposé, les serviettes bien blanches, pliées sans prétentions; sous les plis de la serviette est placé un petit pain. Chaque couvert doit avoir, à droite une cuiller et à gauche une fourchette. Les verres sont placés à droite mais un peu en avant du couvert et en ligne oblique, disposés par rang de hauteur.
Dans les dîners nombreux et à étiquette, on place tour à tour une carafe d’eau et une carafe de vin ordinaire entre chaque convive, de sorte que celui-ci ait le vin d’un côté et l’eau de l’autre; mais dans les dîners familiers, peu nombreux, 6 à 8 personnes par exemple, 2 carafes d’eau et
2 carafes de vin ordinaire suffisent.
Comment on doit placer les convives. – Dans un dîner d’apparat, la maîtresse de maison occupe le centre de la table d’un côté, et le maître le centre de l’autre côté, de sorte qu’ils se trouvent vis-à-vis l’un de l’autre, dans le sens du travers de la table.
Dans les dîners très-nombreux, on place le nom de chaque convive sur l’assiette marquant le couvert. Dans les dîners familiers, c’est, la maîtresse
de maison qui désigne la place de chacun de. ses invités.
La place d’honneur, pour les hommes, est à la droite de la maîtresse de maison; pour les dames, elle est à la droite du maître du logis, la gauche
de l’un et de l’autre est aussi une place d’honneur, mais moins significative.
Par ces dispositions, la dame de la maison doit se trouver entre deux hommes et le maître entre deux dames.
A la suite de ces quatre places privilégiées, viennent s’asseoir les autres convives, en observant, autant que cela se peut, que les dames soient placées entre deux hommes.
Le repas – Pendant -le repas, l’amphitryon et, la maîtresse de maison doivent surtout- veiller à la ponctualité du service mais sans affectation et
sans bruit. Ni l’un ni l’autre ne doivent quitter leur place sous. aucun prétexte. Tout doit être ordonné de façon que leur intervention ne devienne pas nécessaire. Cette règle s’applique même aux dîners familiers: rien n’est désagréable pour les convives de manger en l’absence des maîtres du céans.
Dans les dîners familiers, où le chef de la famille découpe les viandes, il doit trouver à côté de son couvert le couteau et la fourchette à découper.
Aussitôt les convives assis, on sert la soupe dans les assiettes; mais ni la soupe ni les assiettes à soupe ne doivent figurer sur la table elles sont
posées sur le buffet, en attendant. Elles ne sont, présentées aux convives, qu’à mesure qu’elles sont remplies.
Les mets qui constituent le dîner sont où présentés aux convives, ou posés devant le chef de famille pour qu’il les distribue. Si les mets sont détaillés ou faciles à s’en servir, on les présente dans le cas contraire, on les pose sur la table pour être distribués ou découpés.
Dans les dîners familiers, où les vins fins ne sont pas nombreux, on ne présente pas les verres pleins c’est la personne qui préside au dîner qui verse à ses voisins et qui fait ensuite circuler les bouteilles mais les domestiques doivent être attentifs à ce que chaque sorte de vin, soit versé
dans le verre qui lui est destiné.
Dans le cours du repas, les domestiques doivent avoir soin que rien ne manque sur la table; ils doivent toujours être prêts à offrir du pain, de
l’eau où du vin ou d’autres accessoires que les convives pourraient
désirer.
Ils doivent changer les assiettes à chaque mets quant, au couvert, c’est-à-dire le couteau et la fourchette; ils doivent les changer aussi à chaque
mets, si c’est possible en tout cas, ils doivent absolument le changer après le poisson; c’est de rigueur.
Le service doit se faire silencieusement, sans courir, sans parler haut. Quand un domestique offre quelque chose à un convive, soit un, verre, un couteau ou tout autre objet, il doit le présenter sûr une assiette et non à la main. Il doit présenter le pain dans la corbeille où il est déposé.
Si c’est le domestique qui offre les vins fins aux convives, il doit nommer à chacun le nom du vin qu’il offre ou qu’il verse.
Dans les dîners servis plat à plat, le service ne subit aucune interruption, les mets se succèdent les uns aux autres jusqu’à l’entremets; à ce point, les serviteurs enlèvent les assiettes, les couverts, les salières, le pain et toutes les bouteilles disponibles puis ils brossent la table pour enlever les miettes.
Ils donnent alors aux convives, assiettes, cuillers et couteaux à dessert. Ils disposent ensuite le dessert sur la table, dans un ordre symétrique étudié
et prévu d’avance.
Dès qu’on commence à manger le dessert, il est convenable que les domestiques quittent la salle à manger, et laissent aux convives toute liberté; s’ils deviennent nécessaire, la maîtresse de maison les sonne, pour les rappeler.
Après le dessert, il ne reste que le café à servir! Dans les dîners à étiquette, on ne prend jamais le café sur la même table où on a mangé, mais en
famille on préfère le prendre là, a là suite du dessert.
En ce cas, la table doit encore une fois être appropriée, c’est-à-dire qu’on doit enlever assiettes et couteaux, et que la happe doit être brossée à nouveau.
Le dessert.- Le dessert d’un dîner, doit particulièrement attirer l’attention de la maîtresse de maison, car pour bon nombre de convives, il a une grande importance.
Le dessert se compose de fromages, de fruits frais ou secs, de fruits à l’eau-de-vie, de gelées ou confitures, de petits-fours, biscuits, macarons, bonbons et enfin de glaces.
Les fruits, le fromage, les petits-fours ou biscuits sont dressés sur des assiettes ou sur des coupes pied; les confitures, dans les vases même dans lesquels elles ont été conservées ou dans des compotiers en cristal il en est de même des fruits à l’eau-de-vie Les bonbons sont dressés sur assiette ou sur des étagères en porcelaine ou en métal.
Assez souvent le centre de la table est occupé par une corbeille de fruits variés, coquettement dressés, qui reste tout le long du dîner. Quand le dessert arrive c’est autour de cette corbeille qu’on dispose les fruits et les étagères. Les glaces sont présentées.
(«Nouvelle cuisine bourgeoise pour la ville et pour la campagne», Urbain Dubois, 8e édition, 1888)