Pages féminines d’un autre temps… Pensée magique
Fouiner dans les vieux journaux des années vingt et trente, c’est toujours pour moi le gage de belles surprises !
Et la conviction, chaque fois mise en évidence que plus ça change, plus c’est pareil…
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SI VOUS VOULEZ MAIGRIR
– Vous prendrez bien un sandwich?
– Non, vraiment, merci beaucoup !
– Moi je ne vous imite pas. Ce baba au rhum me fait les yeux doux, et je sens bien qu’une fois que je l’aurai dégusté, je ne pourrai pas résister au charme de cet éclair à la crème…
– Moi aussi, dit la grosse dame, j’aimerais mieux être mince, mais il est trop difficile de maigrir. Il faut au moins dix spécialistes pour vous mettre au point, se faire mourir d’inanition et être brisée de courbatures après avoir fait une culture physique enragée.
– Pourquoi dix spécialistes? Mois, je fais ma ligne moi-même…et, si je ne mange pas de petites fours à l’heure du thé, croyez bien que cela ne me prive pas, je n’en ai aucune envie.
– Je vous ai connue un peu plus rondelette, chère amie, et il faut bien reconnaître que vous avez rajeuni de dix ans en perdant, si je ne me trompe, 14 ou 15 livres. Tout au fond du cœur, je vous envie. Et si vous m’indiquiez le moyen que vous avez suivi, et que ce moyen soit simple…
– Le plus simple du monde. Je me suis mise au régime pendant dix-huit jours. Pas un de plus. J’ai perdu, pendant ces dix-huit jours, 14 livres. Depuis, je mange normalement aux deux grands repas et, sans avoir jamais eu besoin de recommencer ma cure, je n’ai pas repris une once. Je n’ai eu recours à aucun autre moyen amaigrissant. Si je fais de la culture physique, c’est pour garder ma souplesse beaucoup plus que pour garder ma ligne. Parmi ces exercices, il y en a deux ou trois qui sont destinés à empêcher de s’empâter certaines parties du corps qui y sont particulièrement prédisposées : les hanches et la partie située un peu au-dessous des hanches… Un point c’est tout.
– Décidément, envoyez-moi votre régime et une explication bien claire de vos petits exercices. Je les suivrai. Il est tout de même bien désagréable, à trente ans, d’être une grosse dame…
(-Journal La Patrie, Dimanche 14 janvier 1940)