Pages féminines d’un autre temps… Savoir se taire
SAVEZ-VOUS VOUS TAIRE?
Répondez-vous à chaque question par oui quand vous êtes nettement affirmative, par oui-non quand vous êtes dubitative, par non quand votre réponse est spontanément dubitative?
Si «oui» obtient la majorité, nos félicitations, si c’est «oui-non» vous avez…une grippe morale qu’il faut soigner, mais si le «non» domine, c’est très grave et plein de menaces pour votre quiétude, gare aux tuiles!
Demande :
- Quand dans un transport en commun quelconque ou dans la rue, une personne inconnue se met à vous raconter des tas de jolies choses, savez-vous rester silencieuse ou tout au plus répondre par monosyllabes?
- Quand dans l’autobus ou le tram, un incident se produit sur la plate-forme et que vous êtes à l’intérieur (donc vous n’avez rien vu), savez-vous ne pas défendre avec véhémence la personne que vous croyez innocente?
- Lorsque le hasard ou l’amitié vous a fait connaître un secret concernant un indifférent ou un ami, savez-vous garder le silence le plus absolu, même si vous êtes habilement cuisinée? S’il s’agit d’un indifférent. S’il s’agit d’un ami?
- Quand Mme X…vous a dit que Mme Y… lui a dit une nouvelle sensationnelle, mais probablement fausse, savez-vous, dans le doute, ne pas le répéter à votre tour?
- Quand il vous arrive une grande joie ou un grand chagrin, savez-vous ne pas les raconter à n’importe qui?
- Si vous êtes secrétaire de votre père ou d’un patron, vous rappelez-vous que le secret professionnel existe et le respectez-vous?
- Quand vous n’aimez pas une personne, savez-vous ne pas saisir toutes les occasions pour parler de ses défauts, de ses manies?
- Quand une amie vous dit être atteinte de tel accident pathologique, savez-vous ne pas lui raconter avec force détails que vous connaissez une personne qui en est morte?
- Quand on vous montre un tableau ou qu’on vous lit de la prose que vous trouvez abominable, mais dont l’auteur se trouve peut-être parmi les personnes qui vous entourent, savez-vous rester impassible?
- Lorsque les mots vont toujours plus vite et le ton toujours plus haut, savez-vous vous taire avant les paroles irrémédiables?
- Et au bridge, quand vous n’avez pas en mains les honneurs et les cartes voulues pour annoncer une couleur, savez-vous vous taire?
(Le Petit Journal, 16 juillet 1939, page 36)