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Tabou

Voici un magazine dont je vous parle régulièrement tant les sujets traités y donnent toujours matière à réflexion.

Ainsi, dans son édition de mai (No 59), le Philosophie Magazine propose-t-il un dossier fort intéressant dans lequel on se demande notamment «Les femmes sont-elles plus morales que les hommes?». À l’heure ou les femmes demandent l’égalité entre les sexes depuis des lustres, voici qu’une nouvelle vague féministe venue des États-Unis revendiquerait maintenant la supériorité des valeurs morales féminines sur les valeurs dites masculines…
«À l’heure où le « deuxième sexe » conquiert la première place – aux États-Unis, les salaires des femmes sont désormais supérieurs à ceux des hommes –, la question se pose avec une acuité particulière : si les femmes prennent le pouvoir, en feront-elles un meilleur usage que les hommes avant elles ? Le débat s’annonce vif…» (Philosophie Magazine)
Mais la partie de ce dossier qui a suscité le plus mon intérêt est sans contredit cet article portant sur un sujet des plus tabous et dont on parle très peu, sinon jamais: «Plaquer sa famille ».

Aussi, dans cet article, on se demande si face à un tel choix de vie, l’enjeu est le même pour une femme que pour un homme. Citant en exemple le peintre Paul Gauguin qui en 1882 abandonnait son métier, sa femme mais aussi ses cinq enfants afin de pouvoir se consacrer entièrement à son art, la question fort pertinente se pose de savoir si un tel choix de vie aurait eu (l’aurait-il même aujourd’hui ?) la même valeur si Monsieur Gauguin…avait été une femme.

Bien sur, le fait que mon arrière-grand-mère, Lucienne, ait elle-même choisi d’abandonner mari et enfants en 1928 pour venir s’installer à Montréal n’est sans aucun doute pas étranger au fait que cet article m’ait directement interpellée… Un choix de vie pour lequel ce serait vraiment un euphémisme que de dire qu’il n’a fait que quelques vagues au sein de la famille !  Les parents de Lucienne ont en effet passé des années à dire des neuvaines et à faire allumer des lampions afin que la «pécheresse revienne dans le droit chemin»… Ma grand-mère Jeanne a conçu toute sa vie, une haine presque morbide pour cette mère qui les avait abandonné, son frère et elle… 

Et puis, l’histoire qui a circulé dans la famille pendant des générations étant que Lucienne avait tout abandonné…pour venir se prostituer à Montréal. Une version à laquelle, je l’ai déjà dit, je crois de moins en moins aujourd’hui…. Car je me dis… Une femme abandonnant mari et enfants n’était-elle pas une putain par définition à l’époque ? Peut-être l’a-t-elle fait par nécessité (1928 c’était tout de même tout juste avant la Crise !). 

Mais tout quitter précisément pour cela ?

Lucienne est morte en 1952, à 48 ans, et son corps a été déposé à la morgue pendant des mois avant qu’un de ses frères n’accepte de s’ occuper des obsèques…


Alors je me le demande. Est-ce qu’une femme qui plaque sa famille est jugée de la même façon qu’un homme qui ferait la même chose ? J’en doute ! Un peu comme si ce genre d’action, on pouvait l’excuser à un homme. 

Mais jamais en cent ans à une femme !

4 commentaires

  • Anonymous

    Bonjour Marie,

    Je suis convaincue -quelle que soit l'époque d'hier à aujourd'hui -, que les femmes seront toujours plus mal jugées que les hommes lorsqu'elles quitteront foyer/mari/enfants.

    Si c'était ton arrière-arrière grand-père qui avait tout abandonné, les commentaires seraient moins sévères à son égard qu'ils ne le furent, j'en suis certaine, (on n'a qu'à penser aux neuvaines de tes grands-parents)envers Lucienne.

    J'ai bien peur qu'il y aura toujours deux poids, deux mesures, entre les hommes et les femmes devant les décisions qui affectent la famille.

    Mais, quelle riche histoire familiale que la tienne ! C'est un trésor pour une écrivaine telle que toi. Je t'envie un peu d'avoir cette palpitante histoire à raconter.

    Bonne fin de journée,

    Marjo

    • MARIE

      On dirait que c'est un peu comme si en ce qui concerne la famille et son bien-être, toute la responsabilité – encore aujourd'hui – revenait à la femme ! Tu ne trouves pas ? Je suis toujours ébahie de voir le regard que posent certaines femmes sur mon mari qui est extrêmement présent avec notre fils: un peu comme s'il était le Messie en chair et en os 🙂 Nous avons toujours cette idée reçue (et fausse !) que les enfants ont surtout besoin de leur mère…alors que c'est un peu comme si le père venait en option !

      Quant à mes histoires de famille, j'avoue que c'est une source inépuisable de choses à raconter et probablement que je n'aurais jamais assez d'une vie pour tout écrire ! Mais que de vies brisées et perturbées pour avoir quelque chose à écrire n'est-ce pas !!!

      Une bonne journée à toi Marjo !

      Marie

  • Étoile

    J'ai une grand tante dont le mari est parti il y a plusieurs années sans jamais lui donner de nouvelles.Elle est restée seule avec trois enfants.La police a recherché cet homme durant de très nombreuses années. Ma tante, un matin a ouvert le journal et a reconnu son mari dans la page des décès. Il avait changé de nom. Les gens autour en avait beaucoup parlé à l'époque.Ils disaient qu'il s'était probablement suicidé,où c'était tannée de la vie familiale…Elle a élevé ses trois enfants seule. Et après qu'ils soient tous partis de la maison elle a fait la rencontre d'un nouveau conjoint qu'on nommait dans le temps, un vieux garçon. Ils ont décidé de vivre ensemble dans le « péché ». Elle a vécu plein de jugements:quelle mauvaise femme,quel exemple elle donne la méchante etc..Elle n'allait plus à l'église elle qui n'avait jamais manqué la messe du dimanche. Tandis que son nouveau conjoint de lui pas un mot,juste de temps en temps il se faisait taquiner par ses anciens amis. Alors je doute fort que si ça avait été ma tante qui avait quitté son foyer sans jamais donner de nouvelles on l'aurait traité de femme de mauvaise vie.Malgré le féminisme,je crois que certaines femmes sont encore jugées très sévèrement. Une femme qui s'est faite agressée dernièrement pas très loin s'est fait traitée « d'agace » .Elle était tranquillement chez-elle et a ouvert la porte à un proche en qui elle avait confiance. Incroyable n'est-ce-pas? Tu as toute une histoire et je comprends ce goût que tu as de savoir. Merci de nous en partager des bouts en attendant le livre! bonne journée chère Marie merci!

    • MARIE

      Voilà que tu confirmes avec ton histoire, chère Étoile, ce que je pensais ! Que son mari la quitte sans jamais donner de nouvelles et voilà que c'est elle qui se retrouve dans le tort ! Je ne me prétend pas féministe dans la mesure ou je ne suis pas d'accord avec tout avantage d'un côté au détriment de l'autre, l'important me semblant de respecter les différences de chacun ! Cependant, il faudrait vraiment se mettre la tête dans le sable pour ne pas voir la différence de traitement que réserve dans ses jugements la société face à l'une et à l'autre. Et c'est très vraie malheureusement qu'encore aujourd'hui, une femme qui se fait violer « l'a surement cherché » ! C'est triste qu'on en soit encore là !

      Une bonne journée à toi aussi 😉

      Marie

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