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Une Éducation, Tara Westover

Il y a des livres parfois qui se révèlent être des gros coups de cœur. Celui-ci – «Une éducation» de Tara Westover – est décidément tout en haut du Top 10 de mes lectures les plus marquantes de cette année qui s’achève.

L’auteure de ce roman, autobiographique on le comprend rapidement, réussit le tour de force, je trouve, de faire du fait vécu un peu anecdotique – à la limite surréaliste –  un témoignage puissant qui touche à l’universel.

Malgré sa jeune trentaine – ce qui peut sembler bien jeune pour écrire une autobiographie, qu’on se le dise! – Tara Westover raconte son enfance dans une famille mormone de l’Idaho américain. Son père, un fanatique un peu paranoïaque qui ne croit ni à la médecine, ni à l’école publique décide d’éduquer ses enfants à la maison. Une éducation qui finalement, se réduira à sa plus simple expression, jusqu’à devenir inexistante. En effet, Tara et sa fratrie finissent peu à peu par être enrôles un peu comme une main d’œuvre à bon marché pour l’entreprise familiale.

De fait, Tara passe son enfance à errer en montagne, à travailler pour ce père qui gagne sa vie grâce à une décharge de ferraille. Puis avec sa mère qui devient sage-femme pour les gens des environs. Et? À attendre la fin du monde que son père annonce comme étant imminente… Ce qui fait qu’en attendant, on se terre à la maison et on cuisine des bocaux de pêches afin de pouvoir survivre le jour venu… Tout cela, un peu en marge du monde alors que les enfants n’ont pas d’extraits de naissance. Et que Tara ne connaît même pas sa date de naissance exacte.

Je le rappelle, nous ne sommes pas ici dans le roman de fiction mais bien dans l’évocation froide d’un fait vécu. Et, on ne parle pas des années quarante mais bien d’une époque plus récente, l’auteure étant née en 1986….

Mais voilà! Tara a soif d’apprendre! Un désir d’être éduquée qu’elle paiera au pris fort parce qu’allant à l’encontre de la culture familiale.

Aussi, à 16 ans, un peu pour échapper à la violence familiale (une violence définitivement systémique), mais surtout, pour avoir accès à l’éducation qu’elle désire plus que tout, elle prend son sac à dos et quitte la maison pour s’inscrire à l’Université. Un chemin qui la mènera de Cambridge à Harvard et au cours duquel elle en viendra purement et simplement par couper tous les liens avec sa famille. La rupture est survenue non pas parce qu’elle est allée à l’université malgré la volonté de son père mais parce que le fossé est devenu insurmontable lorsque après une grave dépression, Tara s’est mise à parler ouvertement des mauvais traitements que lui infligeait son frère Shawn notamment.

«Mes parents n’ont pas pu affronter ces révélations et ont choisi de retourner la situation pour me donner le rôle de la méchante. Dans des familles comme la mienne, il n’y a pas de pire crime que de dire la vérité.» (Entrevue dans Le Figaro)

Je l’avoue, il est difficile de résumer ce livre tant j’en suis ressortie comme un peu sonnée par cette lecture. Car si la première partie porte surtout sur l’enfance et le fonctionnement de cette famille clairement dysfonctionnelle (c’est un euphémisme!), la deuxième partie porte-t-elle sur la construction de la nouvelle vie. Et avec elle, la grande question de savoir jusqu’où doit aller la loyauté envers sa famille. Ou encore, comment passer par-dessus la honte sociale et les déchirements familiaux causés par ce qui  a été considéré presque comme une trahison de sa part.

 «J’ai recommencé à réfléchir à la famille. Elle recelait une énigme, un élément irrésolu. Que doit faire un individu, me demandais-je, quand ses obligations envers sa famille se heurtent à d’autres obligations-envers les amis, la société, ou soi-même ?» (p. 452)

Quoi qu’il en soit, je dois le dire que j’ai été profondément marquée par la réflexion que ce livre a suscité en  moi. Un véritable hommage à l’éducation et au dépassement de soi. Mais surtout, touchée par le grand questionnement de l’auteure qui dans un passage, pose la question de savoir ce que ce serait d’être une femme sans les injonctions de la famille, sans celles de la société, de la publicité, de la religion. Des injonctions qui toutes viennent nous dire comment il faudrait se comporter, de quoi nous devrions avoir envie et ce que nous devrions vouloir faire.

Vous l’avez lu ? Je serais tellement curieuse de savoir ce que vous en avez pensé ? Sinon, je vous le recommande chaudement.

Un très grand livre !

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